Dans l’urgence de la crise sanitaire, l’Etat s’est porté garant de prêts aux entreprises pour leur permettre de garder la tête hors de l’eau. Soumis à un différé d’amortissement d’un an, les remboursements de ces PGE commenceront pour les premiers au printemps 2021. Il est temps pour les banques de s’organiser et de s’équiper pour gérer ces dossiers complexes .
Dispositif de soutien inédit pour répondre à une situation inédite, les prêts garantis par l’état (PGE) ont été mis en place par le gouvernement fin mars 2020 pour pallier les difficultés des entreprises. Les TPE et PME ont massivement souscrit à ce programme, par nécessité, par précaution ou par peur de l’avenir.
Le principe est simple : un prêt de trésorerie est accordé par les banques pour que les entreprises puissent payer leurs charges malgré une activité fortement diminuée, voire arrêtée à cause des régulations sanitaires. Règlement des fournisseurs, paiement des factures, des loyers, de la masse salariale… Le PGE peut couvrir jusqu’à trois mois de chiffre d’affaires et bénéficie d’une garantie de l’État à travers la Bpi France, à hauteur de 70 à 90% du concours selon la taille de l’entreprise. En tout, il s’agit de 300 milliards d’euros de prêts qui peuvent être consentis jusqu’au 31 décembre prochain. Cette mesure, qualifiée de « puissante » et de « consensuelle » par les médias, a été étendue au secteur du tourisme en août avec des PGE « saisonniers ».
Une vague de (non) remboursements ?
Pour en bénéficier, il suffit d’en faire la demande auprès de sa banque habituelle. A ce jour le taux de refus n’excède pas les 3% et seuls les SCI, les entreprises faisant l’objet d’une procédure collective, les établissements de crédit et les sociétés de financement en sont exclus. Le taux d’intérêt est ensuite décidé au cas par cas mais reste bas : de 1 à 1.5% pour les prêts remboursés d’ici 2022/2023, et jusqu’à 2.5% pour un étalement du remboursement sur 4 à 6 ans.
Loin d’être un cadeau, les PGE restent des prêts à rembourser. A l’issue de la première année, les bénéficiaires devront choisir un plan d’amortissement sur 12 à 60 mois. Les banques conservent cependant une part du risque associé (10%) et tout l’enjeu pour elles sera de prévoir « l’après » : la nature même du PGE et le contexte dans lequel il a été créé impliquent une augmentation probable des problèmes de recouvrement à moyen terme – un « défi impossible » selon les experts de Zalis.
En effet, si l’emprunteur est défaillant, les établissements de crédit prêteurs ne pourront récupérer que 70 à 90% du montant prêté via la garantie de l’Etat. Au regard du nombre d’entreprises ayant souscrit à ce programme, ces sommes sont loin d’être négligeables !
S’équiper pour le traitement des dossiers
La masse d’informations à traiter représente un second danger. Le plus fort impact de la crise pourrait bien avoir lieu, lorsque les entreprises ayant effectué des prêts au début de la crise (dès mars) vont commencer à les amortir au printemps 2021. Pour les banques ayant consenti un nombre important de PGE, il faudra anticiper la gestion d’une grande quantité de dossiers, probablement complexes, avec des possibilités de rentrées moindres. Mal préparés, certains établissements bancaires pourraient alors subir des pertes financières importantes. Cette possibilité doit les encourager à mettre en œuvre des outils pérennes dans le domaine du risk management et du recouvrement.
Préparer les banques au risque
Comme tout outil financier réglementé, le PGE nécessite une expertise spécifique. Lors de son développement, l’accent a été mis sur son déploiement rapide. Les banques n’ont donc pas eu le temps d’adapter leurs systèmes traditionnels. Celles déjà dimensionnées et équipées pour gérer de grandes quantités de prêts auprès des entreprises devront simplement réaliser des ajustements. Mais pour toutes, les impacts sur les processus et systèmes internes se feront selon trois axes :
- L’analyse du risque devra prendre en compte le fait que certaines entreprises vont sortir des schémas classiques en cumulant plusieurs dispositifs d’aide en plus du PGE : report du paiement des charges sociales, décalage de l’échéancier d’emprunts…
- Il faudra procéder à un reporting spécifique auprès de la Bpi et mettre en place des procédures particulières de traitement notamment des rejets.
- En ce qui concerne le recouvrement, les collaborateurs chargés du suivi des PGE peuvent être ralentis par des logiciels inadaptés au volume et à la complexité de ces prêts. Dans l’urgence, ils devront, tant bien que mal, adapter des procédés issus de la gestion des prêts aux particuliers, ou encore des tableurs, pour gérer l’afflux de données.
Comment se préparer ?
Etre accompagné d’un partenaire technologique est important car il sera à même de conseiller sur les évolutions du marché, mais aussi sur les outils de pilotage spécifiques. Il existe effectivement des outils qui facilitent toutes les gestions associées au risque et qui permettent d’optimiser le recouvrement grâce à des processus automatisés : rappel des dates clés et des actions à mener, possibilité d’accéder aux informations que possède la banque sur son client pour agir efficacement avec des relances et solutions spécifiques, production automatique des reporting réglementaires et internes… Reste, concernant les petites et moyennes entreprises, la nécessité d’anticiper la reprise des paiements des intérêts et des cotisations sociales.