Les mesures qui permettent aux entreprises de traverser la crise ont des effets pervers pour les banques : comment gérer les retards et défauts de paiements ? Comment faire face à l’accumulation des dossiers ? Avec la reprise de l’activité se dessine une nouvelle manière d’appréhender le risque et le service client, et se joue le futur des relations commerciales.
Aux grands maux les grands remèdes : pendant la première période d’urgence sanitaire, le gouvernement a pris des dispositions pour alléger les obligations contractuelles reposant sur les entreprises afin de les aider à faire face à cette situation exceptionnelle. La fermeture des lieux de production, la baisse de la demande et les restrictions sanitaires ont en effet rendu difficiles, voire impossible, le respect des deadlines, factures et autres contrats commerciaux.
Si les initiatives étatiques ont été bien reçues par ceux qui en ont bénéficié, elles ne sont pas exemptes de risques. Et le reconfinement actuel ne contribue pas à une amélioration de la situation. Prenons deux exemples.
Les risques liés à la période moratoire : le non-paiement des factures
Deux ordonnances, datées du 25 mars et du 15 avril 2020, ont permis la prorogation des délais et dates d’échéances en créant une « période juridiquement protégée » jusqu’à la mi-juillet. Le but : limiter les contentieux et le recours aux tribunaux pendant le confinement. En sortie de moratoire, le danger est donc de voir s’accumuler les dossiers et des affaires à traiter (inscriptions, régulations, recours, exécutions d’obligations…).
Avec la reprise de l’activité, les entreprises confrontées à un arrêt total ou partiel de leur activité pendant le confinement devront faire face à un nouveau danger : celui des retards de paiements de la part de leurs clients. Il y aurait actuellement près de 13 milliards d’euros de factures en attente (sur 700 milliards d’euros de crédits interentreprises), selon la Banque de France. Des sommes dont le règlement peut faire la différence entre survie et faillite pour des milliers de PME, qui comptent sur leur trésorerie pour s’en sortir. La défaillance d’un des acteurs du système pourra entraîner une série de fermetures : un client fragilisé dans l’impossibilité de payer ses factures fera automatiquement retomber le risque sur les entreprises avec lesquelles il aura collaboré.
Les risques inhérents aux PGE
Le 16 mars 2020, le président de la République annonçait la mise en œuvre d’un dispositif massif de soutien aux entreprises sous forme d’avances de trésorerie – les Prêts garantis par l’Etat ou PGE. Un montant de 300 milliards d’euros a été débloqué : les établissements de crédits, rassurés par la participation de l’Etat, ont été encouragés à prêter généreusement et à des taux de 2.5% ou moins. Cet apport devait permettre aux entreprises de faire face au manque à gagner généré par la crise sanitaire.
Le remboursement des PGE doit s’effectuer en six ans, au maximum. En cas de défaillance de l’emprunteur, la garantie étatique s’active et le créditeur peut réclamer un montant fixé entre 70 et 90 % de la somme prêtée. Toutefois, dans la mesure où tous ces prêts ne seront pas remboursés, il reste des incertitudes sur le volume du risque et sur la garantie de l’Etat.
Appréhender le risque en conservant la relation client
Ces risques ne sont cependant pas une fatalité et il reste possible de s’adapter pour assurer une reprise durable. Il s’agit, pour les directions des banques et des services financiers, de repenser la relation client et d’optimiser leurs services en prenant en compte la possible défaillance des emprunteurs.
- Renforcer la communication avec le client
Avant même de penser au recouvrement, il faudra s’intéresser à l’optimisation des données client : cela semble évident, mais adresser les factures et relances aux bonnes personnes permettront à la fois de gagner du temps et d’augmenter vos chances d’être payé. Cela passe par une collecte rigoureuse et précise des coordonnées : l’adresse postale, mais également les lignes de portable, les adresses e-mails…
Une base de données solide vous permettra dans un second temps de digitaliser vos relances, de multiplier et de mixer les canaux de communication dans les stratégies de recouvrement (SMS, Email…). Les nouvelles technologies permettent de raccourcir les délais de négociations, mais aussi de paiement – ces derniers seront facilités par la mise en place de prélèvement automatique, virement, ou des moyens digitaux existant (paiement en ligne par ex).
- Automatiser le traitement des données
Face à un accroissement des volumétries, il est nécessaire d’accroitre la gestion des flux et des encaissements, d’automatiser les étapes de la vie d’un dossier, depuis son ouverture et jusqu’à sa clôture, en passant par l’affectation de stratégie de recouvrement personnalisée et évènementielle.
Il est également nécessaire d’avoir une vision globale du risque encourue.
Pour optimiser l’efficacité de ses relances, il s’agit de communiquer clairement et concrètement avec ses clients : la crise touche tout le monde et les difficultés ne sont plus un tabou. Opter pour un discours clair et concret, faire preuve de compréhension et accompagner avec pédagogie semble être la stratégie la plus féconde pour sauvegarder les relations client à long terme, dans l’approche de lendemain meilleur.